jeudi 8 août 2013

The Fixx - Beautiful Friction

Qui se souvient encore de The Fixx ? Ou mieux, qui en France connait The Fixx ? C'est presque un cas d'école, ce petit groupe new wave british ! Éclos dans les années 80, il a réussi l'exploit de cartonner aux USA, tout en restant littéralement inconnu en Europe, et plus particulièrement dans son pays d'origine. La France aussi les a boudés: au Strapontin, on garde le souvenir d'un concert quasi-confidentiel en 1986, où l'auditoire devait se résumer à une cinquantaine de personnes. Pourtant, ce n'est pas faute de sortir des albums bien fichus, pleins de singles potentiels. Y'a rien à faire, quand ça veut pas, ça veut pas !
 
Aussi, quelle surprise de les voir débarquer avec un nouvel album dans leur musette, près de 10 ans après leur dernier disque. Et il faut avouer que le groupe n'a rien perdu de ce qui faisait son style, puisque ce Beautiful Friction est un retour plutôt bienvenu aux fondamentaux, juste histoire de remettre les pendules à l'heure. C'est qu'entre temps, une autre génération est passée, et leur son, qui évoquait à la fois Simple Minds et U2, s'est quelque peu banalisé au gré des groupes qui se sont multipliés depuis.
 
Justement, ça tombe bien, Anyone Else, qui ouvre l'album, est la meilleure chanson des Killers depuis bien longtemps... avec tout plein de Fixx dedans tout de même, la voix inimitable de Cy Curnin et la guitare fougueuse de Jamie West-Oram. Une formidable entrée en matière, presque trop bonne même, puisque le reste du CD ne parviendra que trop rarement au même niveau. Ceci dit, le reste c'est quand même du Fixx comme on l'aime, entre ballades chaloupées (Beautiful Friction, Just Before Dawn) et rock bien senti (Follow That Cab, Take a Risk). Le retour du bassiste Dan K. Brown, qui avait quitté la formation depuis 1994, n'est sans doute pas étranger à cette tonalité qui évoque avec bonheur les grandes heures du groupe. Si vous désirez vous initier ou si vous les aviez perdus de vue depuis des années, ce Beautiful Friction reste de toute façon un album éminemment recommandable. "Je ne peux qu'être moi-même", chante Cy Curnin, et c'est très bien comme ça.
 
 
En bonus, l'excellent clip de Anyone Else, avec plein de manifestants qui se mettent sur la gueule et de gamins qui courent au ralenti avec des drapeaux !
 
 
 

jeudi 1 août 2013

Snow Patrol - Le Zénith - 7 mars 2012

Called Out in The Dark
 
La France est-elle prête pour Snow Patrol ? C’est la question qu’on pourrait se poser. Je m’explique : en Angleterre, le groupe remplit des salles de la dimension d’un Bercy 3 soirs d’affilée, alors qu’en France, il arrive tout juste à remplir un Zénith. Cherchez l’erreur ! Dans un sens, c’est pas plus mal, car une salle de dimensions modestes vaudra toujours mieux qu’un Stade de France à l’acoustique pourrie. Donc même si on a envie que Snow Patrol touche davantage le grand public (car il le mérite) quelque part on est un peu content d’en profiter dans de bonnes conditions. Cela dit, ce n’est pas parce que la France rechigne à le consacrer que le groupe a bâclé sa prestation, bien au contraire ! Ce dernier concert de la tournée Européenne Fallen Empires a même révélé nos amis irlando-écossais comme un sacré groupe de scène !


Berlin (remix)
J’avais été plutôt réservé sur le dernier album qui, au fil des écoutes successives, se révèle être particulièrement bon. En tout cas, avec suffisamment de matière pour donner lieu à de grands moments en live. Qui plus est, le groupe ayant sorti juste avant son best of, Up to Now, la setlist ressemblait plus à une collection de greatest hits qu’à autre chose. Exit donc les morceaux obscurs ou méconnus, le concert joue la carte de l’efficacité. La mise en scène est au diapason, avec un immense écran LED en fond de scène sur lequel seront projetées des animations, et un light-show véritablement énorme.










Shut Your Eyes
La soirée commence sous les meilleurs auspices avec Ram’s Pocket Radio, qui assure une première partie énergique, originale et réussie. Puis, pile-poil une heure après, Snow Patrol investit la scène au son d’un remix de Berlin, un instrumental du dernier album. Dès le premier morceau, I’ll Never Let Go, un seul mot d’ordre : ça va cartonner ! C’est ça le grand truc du groupe : il attaque tout doux, à la limite de la ballade, puis il sort l’artillerie lourde pour vous achever au détour d’un refrain. Et le fait est que ça marche : Take Back The City, Hands Open, Chocolate … autant de mini-classiques insoupçonnés, qui sont carrément transcendés par l’énergie des musiciens. Les animations mettent intelligemment en contexte l’imagerie de l’aigle, symbole du dernier album, et les effets d’éclairage, aussi divers que variés, vous en mettent plein les mirettes.









Chasing Cars
Le chanteur Gary Lightbody, pourtant handicapé ce soir-là par un rhume, se révèle être un sacré showman, discutant avec le public comme s’il était au pub du coin, et faisant de son mieux pour faire réagir la majorité de culs-de-plomb du Zénith. Car oui, il y avait du boulot, entre le public mou des tribunes et les gugusses de la fosse qui passaient leur temps à commenter le concert en sifflant binouze sur binouze comme s’ils étaient dans leur salon! Le bon Gary ne s’est pas démonté et ses efforts ont été méritoires, avec un ou deux grands moments d’audience participation, avec bras levés et oh-oh-oh-oh ! Run et surtout Chasing Cars ont fait partie de ces instants magiques où le concert était porté par une sorte de grâce.









Fallen Empires
Les morceaux du dernier album tiennent plutôt bien la route en live, et n’ont pas à pâlir face à leurs prédécesseurs. Called Out in the Dark et son beat technoïde rend merveilleusement bien. Quant à Fallen Empires, c’est sans aucun doute le sommet du show : une ambiance apocalyptique, un light-show frénétique sur fond d’animations crépusculaires, et un public conquis qui reprend en chœur les « we are the light »… Le genre de moment d’exception qui vous file la chair de poule ! Après quoi, il suffit au groupe d’attaquer You're All I Have, une de leurs plus belles chansons, pour définitivement emballer le morceau avec des effets de lumière monstrueux. Fin de concert en forme d’apothéose. Un seul petit rappel, avec un des morceaux les moins convaincants du dernier album (Lifening), mais une sortie plus que réussie avec un Just Say Yes qui laisse tout le monde sur le carreau.








 
Au final, on sent le groupe définitivement rodé par son succès outre-Manche : Snow Patrol se balade littéralement sur tous les morceaux de son répertoire avec une aisance réellement impressionnante, mais sait faire place à la chaleur et l’émotion le temps de quelques beaux moments forts. Cela donne un show intense et généreux qui, au-delà de sa grande maîtrise technique et musicale, sait tout de même garder une dimension humaine. Epatant !
  
You're All I Have


La Setlist:
Berlin (remix)
I'll Never Let Go
Take Back The City
Hands Open
This Isn't Everything You Are
Run
Crack The Shutters
In The End
Set The Fire to The Third Bar
The Garden Rules
Make This Go On Forever
Shut Your Eyes
Chasing Cars
Chocolate
Called Out in The Dark
Fallen Empires
You're All I Have
Rappel:
Lifening
Open Your Eyes
Just Say Yes

Snow Patrol - Fallen Empires

Snow Patrol fait partie de ces groupes qui se recommandent fortement de l’héritage de U2 (ils ont d’ailleurs vaillament assuré la première partie du groupe à Bono pour le récent « 360° Tour »), mais qui sont confinés à un anonymat un peu inexplicable dans notre beau pays. Faut dire qu’à l’heure actuelle, la radio n’est plus vraiment au top pour assurer la popularité des artistes qui sortent un tant soit peu du moule. Peut-être que Fallen Empires, leur dernier album, va inverser la tendance, qui sait? C’est en tout cas tout le bien qu’on leur souhaite.

Pourtant, c’était pas faute de pondre des tubes inoxydables, comme l’excellent Chasing Cars. Leurs albums, jusqu’à présent, avaient un peu de mal à me convaincre sur la distance. Les compos étaient bonnes, mais il manquait toujours ce petit plus qui différencie le bon boulot de l’excellence. Pour une chanson vraiment réussie, il fallait s’en cogner tout plein de moyennes.

Aujourd'hui arrive leur nouvel opus, Fallen Empires, et je dois dire que je suis partagé. Les morceaux sont vraiment bons, le groupe arrive à se renouveler avec un son légèrement plus synthétique que par le passé, et il y a une foule de très bonnes choses sur l'album. Le CD tient également bien la route après plusieurs écoutes, je dirais même qu'il se bonifie au fur et à mesure... Alors quoi ? Où est-ce que ça coince ? Ben j'ai juste un petit problème avec les chansons: on dirait qu'il y manque quelque chose, qu'elles sont insuffisamment développées. Je ne sais pas très bien comment définir ça, mais elles ont quelque chose d'inachevé et ont souvent tendance à se reposer sur un refrain béton. Entendons-nous bien: tel quels, des titres comme Called Out in The Dark, Fallen Empires ou The Symphony ont largement de quoi convaincre et séduire. Mais avec un petit chouia de créativité en plus dans les arrangements, on aurait eu là un chef d'oeuvre certifié!

En attendant et malgré ses faiblesses, Fallen Empires reste un album plus que recommandable. Au fil des écoutes, on serait même tenté d'aller voir ce que tout ça donne en concert (ils seront au Zénith de Paris le 7 mars prochain). C'est en tout cas le disque idéal pour tout ceux qui voudraient découvrir ce groupe sympathique, qui gagne définitivement à être connu!

Hep hep hep!!! Ne partez pas! En bonus, la vidéo de Called Out in The Dark:



Rupert Hine - Immunity

A une époque où la technologie musicale permet à peu près tout et n’importe quoi, c’est assez amusant de voir qu’aujourd’hui, bien peu d’artistes profitent de cette liberté créative pour livrer des œuvres qui sortent réellement de l’ordinaire. Pourtant, il y a près de 30 ans, avec le quart du centième des moyens actuels, Rupert Hine réalisait Immunity, qui reste encore à ce jour un album exceptionnel, définitivement en avance sur son temps.
 
Quand on pense producteur reconverti en artiste solo, on pense obligatoirement à Alan Parsons, qui, après avoir produit Pink Floyd, a cartonné quand il s’est décidé à sortir ses propres disques. L’itinéraire de Rupert Hine est beaucoup plus modeste. Producteur d’artistes aussi divers que Tina Turner, Suzanne Vega, Bob Geldof ou Underworld, il a monté son propre groupe, Quantum Jump, avant d’attaquer une carrière en solo au début des années 80. Seulement, là où Parsons se cantonnera à une pop gentillette et inoffensive, Hine jouera les expérimentateurs, dans une approche finalement assez similaire à celle d'un Peter Gabriel.

Cette période est marquée par l’apparition d’une nouvelle génération de synthétiseurs, qui ouvre de nouveaux horizons aux musiciens. Immunity repose donc à fond sur cette nouvelle approche, avec des sons détournés, traités électroniquement, ce que le musicien appelle du sound processing: bruits de circulation transformés en piste rythmique (comme sur Samsara), pistes musicales inversées, bruitages incongrus (Psycho Surrender)… Le disque ne s’interdit aucun délire, et c’est en cela qu’il est novateur. Hine crée un paysage sonore inédit, dans lequel l’auditeur se perd avec bonheur.


L’album pourrait tourner à la démonstration de virtuosité s’il n’était pas soutenu par la richesse des compositions. Les effets ne sont jamais gratuits mais servent au contraire à enrichir des ambiances très diversifiées et souvent envoutantes. Si l’ambiance fait effectivement penser à du Peter Gabriel première mouture, Hine sait cependant se distinguer avec un univers bien à lui, à la fois torturé et vertigineux. Il sait néanmoins rester accessible, comme avec le très popesque morceau éponyme Immunity, sur lequel on trouve Phil Collins en guest star, ou sur Misplaced Love, dans lequel Marianne Faithfull fait une apparition remarquée. Les textes, signés Jeannette Obstoj, sont à l’avenant, avec une certaine distance poétique qui les rend  particulièrement adaptés au ton insolite de la musique.







A l’heure des samples et des séquenceurs, Immunity remet les pendules à l’heure. Cet album pratiquement artisanal, où tout a été fait à la mimine au prix d’un travail phénoménal, respire pourtant la spontanéité et la liberté. Rupert Hine continuera dans cette veine, sur un mode mineur (le Strapontin vous en reparlera), mais en attendant, cet album inclassable et unique en son genre demeure comme l’un des plus novateurs de sa génération.

Le CD:
Longtemps inédit en CD, Immunity a été depuis réédité à deux reprises. Rupert Hine en a profité pour rajouter un inédit (Scratching at Success) et rectifier deux trois petites choses, nottament le mixage de deux chansons, I Think A Man Will Hang Soon et Make a Wish. En effet, la maison de disques lui avait demandé des versions plus soft et lors de la parution du LP. Les mix du CD correspondent à la version initialement voulue par Hine. Enfin, la seconde réédition comporte un nouvel inédit, Introduction to the Menace, soit l’instrumental qui ouvrait les concerts de la tournée liée à l'album.









Enfin, alors que les clips n’étaient pas aussi répandus que maintenant, Rupert Hine sera un des rares à en faire des supports pour sa musique, réalisant même les vidéos de deux titres, Misplaced Love et Surface Tension. A les revoir aujourd'hui, ça prête un peu à sourire car ça a pas mal (beaucoup!) vieilli, mais c'est à découvrir par curiosité.