samedi 26 juillet 2014

Fischer-Z - Going Deaf for a Living

 

fischerz-GDFALCe qui m'avait tapé dans l’œil, à l'époque, c'était la pochette. Parce que quand on y pense, back in the seventies, on n'avait pas vraiment beaucoup de points de repère pour découvrir de nouvelles choses en matière de musique. Donc j'avoue bien humblement que plus d'une fois, c'était la pochette qui me vendait le truc, avant même la musique. Et là, pour le coup, celle-là m'avait bien plu: le gimmick du marteau-piqueur, c’est très parlant. L’oreille sur le recto de la couverture, le coeur côté verso : une belle image symbolique et assez forte. Fallait oser tant il y a quelque chose d'un peu violent à associer ces trois éléments. Une pochette qui, du coup, aurait mieux convenu à un groupe de hard-rock. Or Fischer-Z, c'est tout sauf ça. Il fait partie de ces groupes qui ont éclos dans la mouvance de Police à la fin des années 70. La bande à Sting chamboule alors les hit-parades avec sa new-wave matinée de reggae blanc, c'est la naissance de plusieurs formations qui récupèrent du punk son énergie, mais sans renier pour autant une certaine musicalité.

 

 

 

 

 

 

 

fz1Fischer-Z, c'est essentiellement John Watts, chanteur au parcours plutôt atypique, puisqu'il se met à la musique après des études et quelques boulots en psychiatrie. Rien d'étonnant, donc, que les textes de ses chansons soient un petit peu plus subtils que la moyenne, avec toujours cette petite touche d'humour pince-sans-rire. Mais c'est surtout au niveau des compositions que Watts fait la différence: des chansons concises, à l'orchestration simple et dépouillée, et bourrées d'énergie. Ca, et une voix unique, qui travaille sur deux registres: à la fois extrêmement grave à certains moments (on croirait presque avoir affaire à un chanteur black) et haut perchée à d’autres, dans une tonalité qui ferait presque penser à celle de David Byrne, le chanteur des Talking Heads.

 

 

 

 

 

fz3Watts, c'est clairement la cheville ouvrière de Fischer-Z, son éminence grise, tout comme Sting pouvait l'être au sein de Police : c’est le chanteur qui fait tout et signe toutes les chansons. Du coup, le groupe est presque ramené au statut d’un backing band, au service de son chanteur. Ceci explique pourquoi le groupe se séparera à l'aube des années 80 pour laisser le champ libre à la carrière solo de son fondateur. Un revival aura lieu en 2004, mais sans le punch du line-up original.

Et pourtant, jamais l’omniprésence du chanteur ne se fait sentir. Mieux, après un premier album, Word Salad, plutôt anecdotique, Going Deaf for a Living s’avère être sacrément bon album, même s'il y a une ou deux chansons un petit peu plus faibles que d'habitude. Impossible, par exemple, de se sortir de la tête ce Room Service aux accents reggae, plus Police que Police. Ni cette superbe chanson d'amour, à la fois triste et douloureuse qu'est So Long, qui fût un hit en son temps. Il y a aussi Limbo, conclusion speedée aux paroles imprononçables, un titre qui cartonne bien en concert. Puis aussi Crazy Girl, Pick Up Slip Up… sans oublier la chanson-titre.

 


 

 

Toute la force de Fischer-Z, c’est le refus de la formule et le plaisir de jouer. On sent le groupe soudé, entièrement au service de chansons simples et bien fichues. Et ça donne un album définitivement sans prétention qui emballera sans mal tout fan de new wave qui se respecte. Même si le groupe fera bien mieux par la suite, mais ça on en reparlera plus tard.

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L’album peut encore se trouver facilement sur le net à des prix raisonnables, ou bien en téléchargement mp3. Tout ça, c’est par là.

 

Bonus Vidéo
La  vidéo d’époque (1981) de So Long. Ça a pris un sacré coup de vieux et une grosse claque : il y a tous les tics insupportables des clips qui se faisaient en ce temps-là, mais au moins peut-on voir le groupe dans un playback plutôt réussi. C’est toujours ça de pris.

 

mercredi 16 juillet 2014

Genesis - Duke

genesis-duke-uasAh, Genesis ! Rien que d’en parler, ça rameute une foule de souvenirs, et pour cause ! Un groupe qui a tout de même réussi à se maintenir sur plusieurs décennies, tout en changeant radicalement son fusil d’épaule, ça en couvre une sacrée tranche. Et du même coup, il y en a un peu pour tous les gouts et pour tous les fans. Il y a la période baba-cool, celle des grandes épopées de rock progressif, menée par Peter Gabriel. Puis l’arrivée de Phil Collins, et l’orientation vers un son de plus en plus pop. Mais avec toujours en filigrane, ce talent du groupe pour les compositions travaillées et ambitieuses.

L’album qui nous intéresse, Duke, n’est pas un des plus célèbres du groupe. Il intervient dans la discographie de Genesis à une période où le groupe se cherche. Usés par les tournées, ils s’octroient un break plus long que prévu, l’occasion pour chacun des membres d’y aller de son petit album solo. Banks et Rutherford sortent respectivement A Curious Feeling et Smallcreep’s Day, des disques plutôt estimables mais tout de même très inspirés de Genesis. Seul Phil Collins se détache du lot en signant des compositions qui tranchent radicalement avec ce qu’il a pu faire avec le groupe. Il faut dire que le batteur traverse alors une crise familiale difficile. En plein divorce, il écrit des chansons très personnelles dont la plupart se retrouveront d’ailleurs sur son premier album solo, Face Value.

Toute la puissance de Duke est là : du début à la fin, c’est un album rempli de sentiments forts et de douleur. Fini les balades épiques ou doucereuses. Genesis attaque les années 80 avec un album intense et pourtant rempli d’humanité. On y parle de séparation et de solitude, sur fond d’instrumentaux virtuoses (Behind The Lines) ou de balades mélancoliques (Heathaze). Les trois compères s’y donnent à fond, que ce soit dans un Man of Our Times à la batterie déchaînée ou dans la longue suite instrumentale (Duke’s Travel/Duke’s End) qui clôture magistralement le disque et que le groupe aura le bon goût de reprendre lors de sa tournée d'adieu en 2007. Et puis il y a aussi le tube, Turn It On Again, une des meilleures chansons du groupe qui sera également l’un de leurs plus gros succès.

Avec Duke, le trio expérimentait la recette qu’il utilisera sur tous ses albums suivants : des chansons qui naissent de jam sessions improvisées dont ils récupèrent des petits bouts par-ci par-là. Une bonne moitié – la plus réussie – est signée Banks/Collins/Rutherford, mais les chansons « individuelles » font également mouche, telle cette touchante méditation sur la solitude qu’est Alone Tonight de Rutherford ou encore Please Don’t Ask de Collins, au texte très émouvant. C’est cette profonde sensibilité qui fait tout le prix d’un disque unique et attachant qui, s’il n’hésite pas à s’accorder quelques breaks virtuoses et vertigineux, sait tout de même rester à taille humaine.

 

Les Différentes Editions
vlcsnap-2014-07-18-16h06m14s140L’industrie discographique sait y faire pour que le fan de base repasse à la caisse. Les albums de Genesis ont donc été déclinés en innombrables versions remasterisées ou ultimate. Fort heureusement pour les petits veinards qui découvriront l’album après avoir lu cette chronique, une salve récente de rééditions a tout de même fait les choses bien en proposant le CD dans une version qu’on pourrait presque qualifier de définitive. Le son a été remixé en 5.1 de manière très efficace, et le disque propose des mixages Dolby Digital, DTS et SACD, qui permettent d’en redécouvrir toutes les nuances. Genesis se rapprochait alors d’un son plus brut, avec une batterie très en avant, dont le punch est ici parfaitement restitué.

 

 

 

 

Il y a également des interviews rétrospectives qui reviennent en détail sur la création de l’album. C’est passionnant, mais réservé aux anglophones de bon niveau (il faut pouvoir suivre le débit mitraillette de Tony Banks) car elles ne sont hélas pas sous-titrées en français. Carton rouge pour l’éditeur !

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Également au menu, de longs extraits vidéos d’un live de 1980, enregistrés au Lyceum de Londres, qui est réputé pour être l’une des captations les plus réussies de la tournée Duke. Malheureusement, audio et vidéo sont un peu à la ramasse. L’image accuse son âge et le son manque de clarté. Néanmoins, c’est un témoignage très intéressant sur la performance scénique du groupe à l’époque, avec ses effets très élaborés. Enfin, pour finir, on y trouve également les clips de l’album et une reproduction du programme de la tournée. Il y a donc largement de quoi contenter le fan le plus exigeant.

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Les Clips
Genesis première manière, au niveau des clips, c’était… disons, un peu naze. C’était bien avant que le groupe ne joue avec son image et mise sur des vidéos décalées. Du coup, les clips réalisés pour l’album sont plus ridicules qu’autre chose. Dans Duchess, on voit Collins, Banks et Rutherford déambuler en imper façon pervers pépère dans un vieux théâtre, et pour Misunderstanding, c’est Collins en chemise hawaïenne, qui court d’une cabine téléphonique à l’autre. Seul le clip de Turn It On Again, un playback correctement filmé et plutôt bien éclairé, sort réellement du lot. Mais bon, avec un morceau pareil, la vidéo la plus nulle aurait pris des allures de chef d’œuvre !

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