jeudi 26 septembre 2013

Bruce Springsteen - Born to Run


































 
 
 
 


Sur le Strapontin, on va beaucoup reparler de Bruce Springsteen et de son E Street Band dans les mois qui viennent : nouvel album, nouvelle tournée (on y sera !), ce sera l’occasion pour renouer avec l’un des artistes les plus talentueux et les plus généreux du monde du rock. L’occasion est donc tentante, pour ouvrir les hostilités, de revenir sur Born to Run, sans aucun doute le chef d’œuvre absolu du bonhomme, et accessoirement l’un des plus beaux albums du monde, point barre.
 
 
 
« J’ai vu le futur du rock, et il s’appelle Bruce Springsteen » : rien que ça ! Le journaliste Jon Landau (depuis devenu le producteur du musicien) ne croyait pas si bien dire. A l’écoute de Born to Run, on le comprend un peu, tant l’album forme un tout parfait et inattaquable, qui contient tout ce que le Boss développera dans ses futurs albums : l’amour, la fuite vers une vie meilleure, le quotidien des paumés d’une certaine Amérique. L’album est presque organisé comme un film, même s’il ne s’agît pas vraiment d’un concept album. Le premier morceau, Thunder Road est un véritable manifeste, un peu comme une lettre d’amour que le personnage principal écrit à sa belle, l’incitant à s’évader de cette « ville pleine de losers ». Musicalement, c’est très fort aussi : commencée avec un simple harmonica, la chanson s’étoffe peu à peu avec l’arrivée du piano de l’excellent Roy Bittan, puis de tout le E Street Band, qui reprend l’instrumental de fin comme à la parade. Un grand, un énorme morceau. Tenth Avenue Freeze Out est, par opposition, plus léger et enjoué, alors qu’avec Night, on repart dans la noirceur et l’obscurité.
 
 


La première partie de l’album se clôt sur Backstreets, une épopée où il est question de souvenirs d’enfance. Puis c’est Born to Run, qui est sans nul doute l’une des chansons les plus puissantes et les plus évocatrices de Springsteen. Bâtie sur un riff de guitare meurtrier, c’est là encore une chanson sur la fuite, dont les héros se jurent un amour éternel, sont prêts à s’évader de leur quotidien et sont « nés pour courir ». C’est aussi un des rares morceaux du Boss dans lequel on retrouve intact le punch incroyable de ses prestations scéniques, et c’est bien évidemment l’un des sommets de ses concerts. L’amour, il en est question dans She’s The One, là aussi un des moments forts du disque, plein d’une formidable énergie. Meeting Across the River est peut-être le seul morceau un peu faible, mais en même temps, c’est comme une respiration dans l’album, avant cette pièce maîtresse qu’est Jungleland. Véritable petite épopée qui clôt le disque, ce Jungleland raconte une nuit d’affrontement entre des gangs rivaux. Etalée sur près de 8 minutes, c’est une formidable démonstration d’efficacité du E Street Band, qui brille de toute sa splendeur. Le saxophoniste Clarence Clemons, en particulier, y signe l’un de ses plus beaux morceaux de bravoure.
 
 
 
A aucun moment Born to Run ne sonne comme un disque fabriqué et c’est là sa grande force. Tout le disque respire de cette authenticité profonde qui marquera tous les albums du Boss. Il faudra, c’est sûr, une bonne connaissance de l’anglais pour saisir toute la richesse et la poésie de ce portrait que Springsteen livre de la petite Amérique, celle des laissés pour compte, à travers des paroles d'une richesse formidable. L’album n’est pas non plus une démonstration de virtuosité gratuite. Au contraire, il marque car chaque ingrédient y est parfaitement mis en place, qui plus est avec un brio et une pêche extraordinaire, par des musiciens qui, tout en étant de remarquables pointures, ne sont pas là pour la frime. C’est l’énergie brute de Born to Run, ajoutée à son authenticité, qui en fait un disque unique et inoubliable.




 

 

30 ans déjà !
En général, quand les maisons de disque souhaitent l’anniversaire d’un album, c’est plus pour ramasser quelques pépètes de plus et obliger le fan de base à repasser à la caisse. Mais Springsteen ne fait rien comme tout le monde, c’est bien connu, et la 30th Anniversary Edition de Born to Run est sans doute le plus beau cadeau qu’il pouvait faire à ses fans. Sur le premier disque, on trouve l’album remasterisé, ce qui est déjà pas mal du tout, mais le meilleur se trouve sur les deux autres galettes : tout d’abord un DVD du concert londonien de 1975. D’accord, l’image est pas franchement top, l'accoutrement des musiciens plutôt approximatif (Van Zandt en mac et le Boss avec un bonnet de laine !) et il y a beaucoup de morceaux des 2 premiers albums que personnellement je trouve un peu faibles... Mais quelle présence ! Lorsque le groupe attaque des titres de Born to Run, inutile de dire que ça déboîte grave !
 
 
 
 

Enfin, last but not least, sur le dernier DVD, « Wings for Wheels », une rétrospective passionnante sur l’enregistrement de l’album, qui permet de voir à quel point Springsteen est un perfectionniste et combien chaque élément du disque a été travaillé dans ses moindres détails, pour le résultat fantastique que l'on connait. Il suffit de le voir buter sur les arrangements de la chanson-titre, ou bien toute la section consacrée à l’élaboration de Jungleland et en particulier de sa formidable partie de saxo pour mesurer combien le Boss et son E Street Band ont sué sang et eau sur cet album. Une bien belle édition, qui rend un magnifique hommage à un classique indéboulonnable.

New Order - Le Bataclan - 18 octobre 2011

 
 
Dans la vidéo d’un de leurs derniers tubes, 60 miles an Hour, New Order montre un de ses fans sous la forme d’un gros beauf vêtu d’une peau d’ours et chantant à tue-tête au volant de sa voiture. Mardi soir au Bataclan, les fans anglais n’étaient pas vêtus de peaux de bête, mais étaient tout aussi bourrins (bourrés?).
 
 
 
Petit mot d’explication : New Order n’existe plus depuis plusieurs années, le bassiste Peter Hook ayant jeté l’éponge avec pertes et fracas après un dernier album, Waiting for the Sirens’ Call, décrié par les fans mais que j’avais trouvé plutôt pas mal. Si le groupe remet le couvert des années après, c’est dans un but caritatif, afin de réunir des fonds pour leur ami, le vidéaste Michael Shamberg. Deux concerts exceptionnels, l’un en Belgique, l’autre en France, d’où la présence ici de (trop) nombreux fans anglais.
 
 
 
 
 
 
L’espace d’un instant, je me serais cru à un match de foot ! J’étais encerclé d’olibrius qui sifflaient cannette sur cannette (et pas du coca, je peux le dire) et qui beuglaient à l’attention des musiciens. Bref, s’il y en a qui croyaient encore que les fans de New Order n’étaient pas des blaireaux bedonnants défoncés à la bière, ce soir-là, il y avait largement de quoi les convaincre du contraire !
 
Avant ça, il y a eu l’attente interminable sous la pluie, qui m’a convaincu que le blouson à capuche que je portais pour l’occasion n’était définitivement pas imperméable. Puis, une fois rentré dans la salle au sec, un set de près de 2 h 30 assuré par DJ Tintin (on ne rit pas !). C’est marrant au début, mais ça finit par vous fusiller la tête au bout d’un certain temps.
 
 
 



 
 
 

 
 
 


21 h, New Order entre en scène : c’est Elegy, un instrumental tiré de l’album Low Life. Une belle entrée en matière, planante juste ce qu’il faut. Il y a un écran derrière la scène, sur lequel sont projetés des extraits de clips ou des montages vidéo. Nous sommes assez bien placés, contre les barrières, sur la droite de la scène, juste en face de Gillian Gilbert, qui joue du clavier.
 
Ah, Gillian ! Mes amis buveurs de bière étaient bien contents de la revoir ! Il faut dire qu’elle avait quitté le groupe en 2001 pour se consacrer à sa fille malade. Donc, forcément, ça y allait ! « We love you, Gillian ! », et elle, imperturbable derrière son synthé. Pas un sourire, rien ! Ca changeait pas beaucoup de la dernière fois que je les avais vus, en 1987, sauf qu’entretemps la punkette mimi des années 80 est devenue mère de famille. Forcément, ça faisait un peu bizarre.





 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
066
 
Passée l’intro délicate, le groupe attaque les choses sérieuses avec Crystal, un morceau bâti sur mesure pour la scène. Pourtant, de là où nous sommes, le son n’est pas vraiment top. Les instruments couvrent la voix du chanteur Bernard Sumner, mais le bassiste intérimaire, Tom Chapman, se débrouille plutôt pas mal, même s'il restera beaucoup trop en retrait pendant la majorité du concert. Puis c’est Regret, l’une de leurs meilleures chansons, mais là encore, le son est limite bouillie.
 
Le reste du set est correctement dosé, entre vieux classiques revisités (Love Vigilantes, Age of Consent, Ceremony) et morceaux plus connus. Quelques surprises bienvenues, comme ce 1963, rarement joué en concert. Enfin, le show s’envole réellement avec d’excellentes versions de True Faith et  Bizarre Love Triangle, qui est décidément l’une de leurs plus belles réussites et qui n’a jamais mieux sonné en live. Le groupe embraye sur un Perfect Kiss remarquable, puis achève le public avec Temptation. En fait, les morceaux dance passent beaucoup mieux l'épreuve de la scène que ceux purement rock. Question de balance son, sans doute.
 
 
 
 
 
 


Un petit rappel, avec un Blue Monday un peu foiré par Gillian (un ton trop bas, mais Bernard Sumner vient lui prêter main forte en fin de morceau), puis en guise de conclusion, l’hymne de Joy Division, Love Will Tear Us Apart. Les fans anglais (les autres aussi, d’ailleurs) sont déchainés, et le concert se termine en apothéose.
 
 
Love Will Tear Us Apart
 
 
Bilan : une heure et demie de concert, c’est un peu short, mais bon, New Order ne nous a jamais habitués aux marathons scéniques à la Springsteen. Le son non plus n’était pas à la hauteur, mais ça aussi, ça fait partie des défauts du groupe. On pouvait juste penser qu’en 20 ans, ils auraient un peu progressé sur ce plan, mais non. Malgré l’absence de Peter Hook, ce comeback avait tout de même de la gueule. Maintenant, à savoir si le groupe va continuer comme avant, c’est une autre histoire. Une chose est sure : c’était sans doute une des dernières occasions de pouvoir les revoir en live et ils n’ont pas bâclé leur sortie.

La Setlist:
Elegy
Crystal
Regret
Ceremony
Age of Consent
Love Vigilantes
Krafty
1963
Bizarre Love Triangle
True Faith
586
The Perfect Kiss
Temptation
Rappel:
Blue Monday
Love Will Tear Us Apart